Que se passe-t-il ? Les grandes enseignes ferment !
2025/05/02
Depuis quelques mois, un phénomène que beaucoup préféraient ne pas voir commence à devenir impossible à ignorer. Zara ferme des magasins, Castorama réduit la voilure et SFR lâche des adresses qu’on croyait éternelles. Et il ne s’agit pas d’une simple “optimisation de réseau”, comme on le lit parfois dans des communiqués bien maitrisés. Il se passe quelque chose de beaucoup plus profond, quelque chose qui touche à notre mode de vie, à notre rapport même aux lieux que nous fréquentons.
En réalité, c’est tout le modèle du commerce traditionnel qui est en train de basculer. Ce n’est pas brutal, mais c’est clair comme de l’eau de roche. Le commerce physique est devenu un poids lourd pour beaucoup d’enseignes. Les loyers grimpent en flèche dans les grandes villes. Les charges sociales et énergétiques explosent !…et en face, les clients, eux, ne sont plus au rendez-vous comme avant. Moins de pouvoir d’achat, plus d’arbitrages, plus d’achats en ligne aussi. Ce que nous vivons, c’est une double lame, déjà l’effondrement progressif de la rentabilité de certains magasins ainsi qu’une transformation radicale des comportements de consommation.
Pendant longtemps, aller faire les magasins, c’était un réflexe, une habitude presque culturelle. Aujourd’hui, c’est devenu un acte choisi, souvent réfléchi, parfois repoussé. Acheter un pull, une perceuse, un nouveau téléphone ne justifie plus forcément de se déplacer. À cela s’ajoute une autre mutation, plus silencieuse encore… le besoin d’acheter moins mais mieux, d’accorder du sens à ses choix de consommation, de privilégier des expériences uniques plutôt que des rayons standardisés. Et face à cette évolution, des géants comme Zara ou Castorama, malgré leur puissance, se retrouvent avec des mètres carrés devenus inutiles, coûteux…vides !
Alors bien sûr, derrière ces fermetures, il y a le risque de voir émerger ce que certains commencent à appeler les “déserts commerciaux”. Un peu comme on parle depuis des années des “déserts médicaux”. Des centres-villes qui se vident, des quartiers qui perdent leur âme, des galeries commerciales qui deviennent des coquilles fantômes. Moins de commerces, c’est moins d’emplois directs, mais aussi moins de flux, moins de vie, moins de sécurité parfois. Et ce n’est que le début ! Parce qu’il ne faut pas se raconter d’histoires, d’autres enseignes vont suivre et pas uniquement dans le textile ou le bricolage. Le phénomène touche déjà l’électroménager, la culture, la grande distribution spécialisée… Ce qui est en train de tomber, c’est un modèle qui a régné pendant des décennies, basé sur l’hypermarché, le centre commercial périphérique, le “one stop shopping”. Aujourd’hui, ce modèle ne fait plus rêver, il fatigue, il pèse !
Le risque pour l’économie est réel et immédiat, parce que chaque fermeture de magasin, ce sont des dizaines d’emplois supprimés. Il est aussi structurel, parce qu’un territoire sans commerce perd de sa valeur, de son attractivité, de son dynamisme. Et dans une économie déjà sous tension, la moindre faiblesse locale peut entraîner des déséquilibres beaucoup plus larges, invisibles au début, mais lourds à corriger par la suite.
Alors face à ça, la question est simple, que faire ? Comment prépare-t-on nos jeunes à affronter ce nouveau paysage ? Comment leur donne-t-on les armes pour ne pas subir ce basculement, mais pour en être les acteurs ?
À ITIC Paris, où je dirige la communication et le marketing, on se pose cette question tous les jours. Former au commerce aujourd’hui, ce n’est plus seulement apprendre à vendre un produit ou à gérer un rayon. C’est comprendre comment un client pense, comment il évolue, comment il construit son rapport aux marques. C’est apprendre à tisser une relation qui dépasse l’acte d’achat, qui crée du sens, de l’émotion, de la fidélité. C’est intégrer que le commerce de demain sera hybride ou ne sera pas : une présence physique, oui, mais enrichie, augmentée, pensée comme une expérience unique que le digital viendra compléter et non remplacer.
On doit aussi former nos étudiants à être plus agiles, à comprendre qu’une carrière ne sera plus linéaire, qu’il faudra parfois créer son propre emploi, inventer son propre concept, saisir des opportunités là où d’autres voient des ruines. Leur apprendre à lire les signaux faibles, à anticiper les changements plutôt que de les subir. À devenir non pas seulement des employés, mais des entrepreneurs de leur propre vie professionnelle !
Le commerce ne va pas disparaître, car nous aurons toujours besoin de se rencontrer, d’échanger, de ressentir. Mais les formes que cela prendra seront très différentes, les boutiques de demain seront peut-être plus petites, plus éphémères, plus créatives, plus ancrées dans des valeurs fortes. Ce qui est certain, c’est que nous ne reviendrons pas en arrière.
Au fond, c’est aussi une super occasion de remettre du vrai dans nos échanges. De redonner du sens à ce qu’on achète, mais aussi de recréer des liens économiques et humains plus solides, plus justes. Mais pour que ça marche, il faut absolument préparer nos jeunes à ce nouveau monde, sans leur faire croire que l’ancien modèle va revenir. C’est une chance incroyable de construire quelque chose de beau, pour eux et avec eux, et aussi d’aider les générations d’avant à s’y habituer en douceur.
Publié le 02/05/2025
- Époque