Il faut des règles absolues et des exceptions permanentes

À la suite d’une émission que j’affectionne particulièrement (En Aparté), où Emmanuel Béart était invitée, une phrase qu’elle cita résonna en moi : « Il faut des règles absolues et des exceptions permanentes. ».

Cette phrase capture une idée essentielle qui traverse la pensée humaine depuis toujours : comment concilier l’ordre et la souplesse, la stabilité et l’adaptation ? À première vue, tout semble paradoxal dans cette phrase. Pourtant, c’est précisément dans cette tension que réside la clé d’une transformation continue et harmonieuse. Sans cadre, tout s’effondre dans l’anarchie. Sans souplesse, tout se fige dans une rigidité stérile. Ce qui fait avancer le monde, ce qui fait évoluer la pensée, c’est justement cette alternance entre principes immuables et ajustements nécessaires.

Ces règles absolues existent pour structurer, donner un sens, un cap, une direction. Elles permettent aux sociétés de tenir debout, aux civilisations de se bâtir et aux individus de trouver des repères. Sans elles, il n’y aurait que chaos et incertitude. Une société sans principes clairs s’écroule sous le poids de l’imprévisibilité. Un être humain sans valeurs profondes se perd dans l’inconstance. Mais ces règles, si elles restent figées, deviennent des prisons. Une règle qui ne peut être interrogée finit par étouffer la liberté, par freiner la progression et par empêcher la remise en question. L’histoire nous montre que l’ordre naît parfois du chaos, mais faut-il vraiment attendre l’effondrement pour évoluer ?

C’est là que l’exception prend tout son sens ! car elle n’est pas là pour détruire la règle, mais pour la rendre plus juste, plus adaptée, plus humaine. L’exception rappelle que chaque situation reste unique, que la vie est mouvante, que l’absolu a besoin de respiration pour ne pas devenir oppressif. Elle est ce qui empêche le dogme, ce qui permet l’intelligence et ce qui ouvre la porte à la nuance. L’exception n’est pas une négation des principes, mais leur mise à l’épreuve, leur raffinement, leur ajustement aux réalités du monde.

C’est dans ce va-et-vient entre la règle et l’exception que se construit toute forme d’évolution. La connaissance progresse en remettant en cause les vérités d’hier. La morale s’adapte aux transformations de la société. La loi elle-même intègre cette nécessité d’interprétation et de cas particuliers. De même, dans une vie personnelle, savoir quand s’accrocher à ses valeurs et quand accepter de les faire évoluer est un exercice délicat, mais essentiel. Trop de rigidité mène à l’intolérance, trop de souplesse à l’incohérence.

Se transformer sans se perdre, avancer sans renier ce qui nous fonde, c’est donc comprendre ce subtil équilibre. Suivre des règles, mais ne jamais les appliquer aveuglément. Accepter des exceptions, mais ne jamais les laisser devenir des excuses pour tout contourner. C’est ainsi que se construit une pensée vivante, une action juste et une existence qui ne se contente pas de répéter le passé, mais sait en tirer le meilleur pour façonner l’avenir…